La recette d’une formation professionnelle réussie : l’appel de la Cour des comptes à une réorientation du soutien public en France

Temps de lecture : 5 min

La Cour des comptes a récemment exprimé des préoccupations concernant la dynamique actuelle des dépenses dans le domaine de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Les dépenses publiques dans ce secteur ont atteint 21,8 milliards d’euros en 2022, selon une note de synthèse de la Cour.

La libéralisation du cadre de la formation professionnelle initiée par la loi du 5 septembre 2018 a conduit à une augmentation significative des dépenses. Les populations les moins qualifiées, pourtant celles qui bénéficieraient le plus de ces formations, ne sont pas au cœur de cette dynamique.

L’alternance, l’une des principales politiques de formation professionnelle, a coûté 16,8 milliards d’euros aux finances publiques en 2022, notamment en raison de l’augmentation des contrats d’apprentissage, du dispositif de promotion par l’alternance des salariés (Pro-A) et des aides à l’embauche.

La Cour des comptes a également souligné que le coût du compte personnel de formation (CPF) a atteint 2,5 milliards d’euros en 2022. De plus, l’objectif d’atteindre un million de nouveaux contrats d’apprentissage par an d’ici 2027 pose des problèmes de financement.

Le système de formation professionnelle et d’apprentissage est actuellement en déficit, malgré une reprise économique amorcée au second semestre 2021. Sans l’intervention de l’État à hauteur de 4 milliards d’euros et des concours bancaires de 2,6 milliards d’euros en 2022, France compétences, l’opérateur responsable de la régulation et du financement de ces formations, aurait été en cessation de paiement dès septembre.

Selon la Cour des comptes, il est urgent de réorienter la dépense publique vers des publics prioritaires, de renforcer la qualité des formations et de lutter contre la fraude. La Cour a formulé 12 recommandations principales, notamment l’élaboration d’une stratégie avec des priorités claires, le développement de mécanismes de régulation pour améliorer la qualité des prestations de formation, la lutte contre la fraude, ainsi que l’ajustement des recettes pour stabiliser le financement des priorités.

Les chiffres clés en 2022

21,8 Md€ de financements publics en faveur de la formation professionnelle des salariés et de l’alternance : 

– Ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion : 11,3 Md€ de dépenses budgétaires et fiscales, dont 4 Md€ de dotations exceptionnelles à France compétences ; 

– France compétences : 14,5 Md€ de charges, principalement financées par les entreprises (10,3 Md€) ;

– dont 16,8 Md€ en faveur de l’alternance : – dont 4,8 Md€ d’aides à l’embauche d’alternants; 

– dont 10 Md€ pour le financement des contrats ;

837 000 nouveaux contrats d’apprentissage ;

– Plus de 2 050 000 titulaires de CPF formés pour un coût de 2,5 Md€ à la charge de France compétences.

Les recommandations

Les principales recommandations issues de ces travaux visant à améliorer la qualité et la maîtrise de la dépense publique dans le champ de la formation professionnelle et de l’alternance ont porté sur :

– « mettre en place un plan d’action pour assurer le contrôle de la qualité pédagogique des formations en apprentissage » (ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion, ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche) ; 

– « arrêter en 2023 un plan de lutte contre les fraudes à la formation professionnelle ciblant particulièrement la certification Qualiopi et le compte personnel de formation » (ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion) ; 

– « mieux prendre en compte la lutte contre la fraude dans la certification et le contrôle qualité en renforçant, de manière formalisée, les exigences vis-à-vis du Cofrac, des organismes certificateurs et des financeurs institutionnels ; en tirer un bilan d’ensemble en 2024 » (ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion) ;

Sur le compte personnel de formation (CPF), les formations autorisées sont les suivantes :

  • Formation de management liées à l’exercice de la fonction de chef d’entreprise
  • Formation de conseil et d’accompagnement pour démarrer un projet de création ou de reprise d’entreprise, puis pour assurer un avenir fiable à son entreprise
  • Bilan de compétences
  • Formation pour la VAE
  • Préparation au permis de conduire, l’épreuve théorique et pratique, pour les véhicules légers et lourds

 

Par ailleurs, le demandeur doit également consulter le FAF dont il dépend pour connaître les formations éligibles, car chaque FAF a ses propres critères. 

– « redéfinir […] les niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage, [notamment] en définissant les niveaux recommandés par France compétences au plus près du coût de revient des diplômes […] » (ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion, France compétences) ; 

– « mettre fin aux aides exceptionnelles versées aux employeurs d’alternants » (ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion, ministère délégué chargé des comptes publics), pour revenir à un dispositif plus proche de celui en vigueur avant la crise sanitaire ; 

– « instaurer une participation modulable des bénéficiaires des formations financées dans le cadre du compte personnel de formation » (ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion) ;

– « instaurer une dotation pérenne de l’État à France compétences affectée au financement de l’apprentissage afin de redonner des marges de manœuvre à son conseil d’administration pour financer des priorités cohérentes avec la transformation des métiers » (ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion, ministère délégué chargé des comptes publics).

– « inscrire dans la prochaine convention d’objectifs et de performance (2023- 2025) une trajectoire financière pluriannuelle soutenable, assortie des principaux leviers pour y parvenir en dépenses et en recettes » (ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion, France compétences).

Face à ce défi, le ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion, ainsi que France compétences, sont appelés à jouer un rôle majeur pour redresser la situation et assurer un financement adéquat et une utilisation efficace des ressources dans le secteur de la formation professionnelle et de l’apprentissage.



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